[PORTRAIT] L’antidépresseur

SAVEZ-VOUS QUE SAINT-ÉTIENNE A FAIT PARTIE DE SA « GRANDE VADROUILLE » ? DANS LES ANNÉES 1930 PLUS VIVANT QUE JAMAIS LORS DU CONFINEMENT, L’ACTEUR COMIQUE LOUIS DE FUNÈS A SU DÉFIER LE VIRUS LE TEMPS D’UN FILM. TRENTE-SEPT ANS APRÈS SA MORT, SON PERSONNAGE DE PETIT AGITÉ AUX MIMIQUES LÉGENDAIRES AMUSE TOUJOURS AUTANT.

Les chaînes de télévision ont misé sur lui pour réconforter les Français lors des temps troublés par l’épidémie du coronavirus. Les aventures de Louis de Funès ont remporté un record d’audience grâce à ses talents de comique. Son plus grand voeu : « Faire rire les petits et les grands dans ce monde trop triste », avait-t-il confié de son vivant. Il a été exaucé par son génie. L’éternel grincheux, fourbe, hypocrite, grippe-sou voire raciste, n’a pas toujours été le drôle de fou du rire. Né en 1914 dans les Hauts-de-Seine, Louis de Funès de Galarza est un artiste dans l’âme. Initié très tôt par sa mère à la musique, cet ancien pianiste de bar sous l’Occupation, passionné de jazz, se retrouve pour la première fois en contact avec le monde du cinéma en 1933 parmi une foule de figurants. Il s’inscrit à l’École Technique de Photographie et de Cinéma de la région parisienne. De Funès racontait que sa mère fut son premier professeur : « Il arrivait à ma mère de me courser autour de la table en criant “Yé vais té toué”. Dans sa façon d’être et d’agir, elle possédait, sans le savoir, le génie des planches. »

EN ROUTE POUR SAINT-ÉTIENNE

En 1936, il ne joue pas encore la comédie. Alors âgé de 22 ans, loin du cupide « Don Salluste », il vit à la manière d’un valet, dans un modeste habitat de dix mètres carrés sous les toits de la ville minière, au 3 rue Mercière. Simple étalagiste chez Monoprix place du Peuple, il partage sa vie avec Germaine Carroyer qu’il épousera en terre stéphanoise et avec laquelle il aura un fils, Daniel. Il enchaînera alors les petits boulots. Mais de Funès rêve d’une vie de folie et de grandeur. Téméraire, il ne grimacera pas en débutant par de la figuration. Il jouera ainsi des petits rôles pendant des années. Entre-temps, il divorce et rencontre Jeanne Barthélémy, sa deuxième femme, une parente de l’écrivain Guy de Maupassant. La femme de sa vie, selon l’expression consacrée.

" Mon voeu ?
Faire rire dans ce monde trop triste. "

Il sait marier dans son jeu plusieurs formes comiques. Dès lors, sa filmographie correspond aux Trente Glorieuses (1945-1975) et les Français attrapent le virus de Funès, toujours aussi coriace à l’heure actuelle. « Avec lui, on oublie ses soucis pendant 90 minutes », souligne un cinéphile.

En 1956, son interprétation dans La Traversée de Paris de Claude Autant-Lara, face à Jean Gabin et Bourvil, lui vaut le Grand Prix du Rire. Il enchaîne les comédies telles qu’Oscar, Pouic-Pouic, le Gendarme de Saint-Tropez, Fantômas, Le Corniaud… Puis La Grande Vadrouille qui détiendra pendant vingt ans le record du plus grand nombre de places de cinéma vendues en France. L’acteur mythique, que ses proches jugent « très gentil et soucieux des autres » en dehors des plateaux, entre alors dans l’histoire du cinéma français. Il fait des ravages en Maréchal Cruchot avec sa bande de gendarmes à Saint-Tropez, époustoufle en rabbin dans Les Aventures de Rabbi Jacob, épate en ministre dans La Folie des grandeurs. C’est la gloire. En 2020, en un après-midi de confinement, il réunit encore 5 millions de spectateurs. De Funès reste à lui seul le vaccin de la morosité. Mais en 1983, il est « l’or » pour lui de s’envoler. Le plus célèbre clown de l’Hexagone est parti tutoyer les étoiles. Peut-être, les fait-il rire ? Ici, Louis de Funès demeure une étoile riante.

>> En 5 dates

1983 Décès à Nantes

1966 " La Grande Vadrouille " de Gérard Oury

1943 Second mariage avec Jeanne Barthélémy

1936 Mariage à Saint-Étienne avec Germaine Carroyer

1914 Naissance à Courbevoie

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