[PORTRAIT] Élizabeth Ducottet : la fibre internationale

Et si la stratégie internationale se conjuguait au féminin ? PDG de l’entreprise Thuasne, leader européen des dispositifs médicaux textiles, Élizabeth Ducottet est une conquérante. Tour d’horizon avec cette dirigeante ligérienne, à l’occasion des 175 ans du groupe aux racines stéphanoises.

"Il fallait vraiment sortir de France où on était déjà leader », souligne Élizabeth Ducottet, tirant sur sa valise à roulettes, prête pour un ultime voyage. Son cap est net et précis : le monde. De plus en plus éloigné de son berceau historique, Thuasne s’implante d’abord en Europe, puis à l’international : « Depuis 2000, nous ouvrons chaque année une filiale à l’étranger. » Aujourd’hui, l’entreprise en compte quinze en Europe, en Asie et aux États-Unis. Et sa présence commerciale se retrouve dans 85 pays. Sa stratégie ? « Il faut avoir l’audace d’investir des moyens humains et financiers importants pour un succès qui n’est pas immédiat. Cela dépend aussi du pays, du contexte historique et des opportunités. » Et depuis qu’Élisabeth est aux commandes, le chiffre d’affaires de la société a bondi de 27 à 250 M€ en 2021. Une véritable entreprise élastique. 

De père en fille

Thuasne, c’est d’abord une histoire de famille. L’enfance de la dirigeante est rythmée par l’usine. En compagnie de son frère et de ses deux soeurs, Élizabeth Ducottet participe aux visites de l’entreprise. « Nous vivions juste à côté. C’était le centre d’attention de la famille. Dès qu’il y avait une nouvelle machine, on allait vite voir ! », se souvient-elle. C’est son grand-père maternel, l’ingénieur Maurice Thuasne, qui met au point la première bande à varices, en 1932. « C’était un visionnaire… Le premier à avoir compris qu’un tissu élastique pouvait avoir une application thérapeutique en tant que bande de contention. » Ce virage vers le médical aide l’entreprise à dépasser toutes les crises du textile. De fil en aiguille, elle élargit son offre à d’autres produits remboursés par l’Assurance maladie : bas de compression, ceintures lombaires, etc.

Tout en ayant un pied dans l’entreprise, la future héritière des « Établissements Thuasne » tisse sa toile. Bachelière à quinze ans, cette passionnée de littérature entre à l’Université Jean-Monnet à Saint-Étienne. « À son ouverture », se remémore-t-elle. Diplômée en psychologie, sciences humaines et linguistiques, elle passe un certificat de capacité d’orthophoniste. « Les sciences humaines sont une forme de littérature, non ? » Durant une dizaine d’années, Élizabeth Ducottet exerce une fonction de psychologue clinicienne et orthophoniste à Paris. En 1980, elle entre chez Thuasne pour travailler aux côtés de son père, successeur et gendre de Maurice Thuasne. Frappé d’un AVC en 1991, il la nomme alors présidente. S’ensuit une période qui lui donnera du fil à retordre : « Je passais le diplôme de l’Executive MBA du groupe HEC, je travaillais et j’avais mes enfants ». Cette battante se tisse alors un solide réseau dans le microcosme entrepreneurial. 

 

Thuasne apporte du confort aux gens.

 

La fibre médicale... et familiale

PDG à 45 ans, Élizabeth a la fibre dirigeante. Avec 2 700 collaborateurs dans le monde, cette adepte du jardinage ne cesse de cultiver l’innovation. « Il est temps d’intégrer le digital à la technologie pour une industrie plus rapide et plus efficace. » L’entreprise aux racines stéphanoises, spécialisée dans le matériel orthopédique est au croisement de la médecine, de l’industrie, de la recherche… Elle conçoit et distribue des solutions de santé adaptées. « Et la santé est au coeur de la famille », en citant notamment son frère, ancien doyen de la faculté de médecine. Chaque année, une trentaine de dispositifs est lancée. « Plus que de notoriété, il s’agit d’ailleurs de légitimité : des millions de patients dans le monde font aujourd’hui confiance à Thuasne. On apporte du confort, on facilite la vie des gens. »

Élizabeth est fière d’apporter une solution médicale au sein d’une ville dont le savoir-faire textile est historique. Entourée de ses enfants, prêts à reprendre le flambeau (sa fille Delphine Hanton est désormais directrice générale du groupe), l’entrepreneuse est optimiste en l’avenir. Les crises ? « On les traverse ! Et comme disait si bien Edmond Rostand : "C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière" ».

>> En 5 dates

1980 : Entrée chez Thuasne

1986 : Directrice commerciale

1991 : Présidente directrice générale

2011 : Acquisition aux États-Unis de Townsend Design

2022 : 175 ans de l’industrie Thuasne

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