[C'EST DANS L'ACTU] 70e SaintéLyon, un souffle dans la nuit noire
C’est le grand rendez-vous sportif de fin de saison. 70 ans que cœurs et poumons vibrent au rythme de la SaintéLyon. Le Stéphanois Gilles Guichard raconte la doyenne des courses d’ultra.
Publié le 4 novembre 2024
Ce contenu vous est proposé en lien avec l'association "Donne-moi tes yeux".
Il faut l’avoir déjà courue pour savoir l’excitation, le doute, les revers, l’épuisement. La SaintéLyon fête son 70e anniversaire ce mois-ci. Combien de « finishers » pour témoigner du phénomène ? Des cohortes entières, nées dans le sillage des premiers foudres de guerre.
Le rendez-vous, en 1952, est affaire de cyclotouristes en mal d’entrainement. On s'élance à l’époque dans le sens Lyon-Saint-Étienne chaussé de gros godillots (il est strictement défendu de courir), pour faire étape à l’Auberge Beauséjour de Sainte-Catherine. Les années passant, le format évoluant, interdits et records tombent. Les chronos chutent de 9 heures à 7h30, puis 5h20 et 4h19.
Dans la sphère trail, on dit le rendez-vous exigeant, ingrat. Les conditions sont hivernales, le temps glacial (même s’il n’est meilleures éditions que celles disputées sous la neige), le terrain piégeux ; c’est beaucoup demander aux frontales que de vaincre l'obscurité totale, sans parler du verglas sous-jacent.
« La SaintéLyon est une course de souffrance », confirme Gilles Guichard, entraîneur du club Atousports à Saint-Jean-Bonnefonds qui garde de l'épreuve un premier souvenir cuisant.
En 2003, le Stéphanois a l'avantage. Cinq minutes d’avance sur ses poursuivants l’autorisent à rêver d’une victoire solo après deux participations en équipe (10e en 2001, 2e en 2002). Les pierres roulent dans la sinistre descente du Bois d’Arfeuille. Au sortir du couvert, il calque sa foulée sur la cadence de relayeurs. Les leaders s’orientent vers Saint-André-la-Côte avant de réaliser leur erreur. À leur suite, le Stéphanois s’est éloigné du tracé. Trop éloigné. Il s’entête à vouloir refaire son retard mais la fatigue le rattrape sous les Aqueducs de Beaunant qui consignent sa reddition. « La panne sèche. J’étais complètement rincé, se souvient-il. Je suis monté dans la voiture. Retour à la maison. »
Dangereuse euphorie
Le trailer s’aligne à nouveau en 2004. « J’avais une revanche à prendre ». Jérôme Trottet est donné favori. « Je m’en suis servi de poisson pilote. On a laissé partir la course. Les premiers ont pris six minutes d’avance. À Soucieu, j’ai décidé qu’il était temps de jouer ma partie. J’ai lâché Jérôme et j’ai foncé. Je me souviens de cette arrivée au Palais des sports. De ces lumières, au bout de la nuit. C’était la délivrance ». La consécration.
Suivent d’autres titres sur Les Templiers, avec l’équipe de France de trail dont il coache un temps les espoirs… Mais la SaintéLyon conserve sur lui un fort pouvoir d’attraction. Cinq fois encore, il retrouve les familières ascensions du col de la Gachet et de Sainte-Foy-les-Lyon (la dernière en 2013).
« Il existe une certaine euphorie à courir la nuit, glisse -t-il. On a attendu toute la journée. L’ambiance est différente. Mais il ne faut pas se laisser gagner par ça. Le mieux est de rester dans sa bulle, de laisser la fatigue venir à soi, sans la provoquer. Garder son énergie pour la diffuser au bon moment ».
Ils seront 17 000 ce 30 novembre (7 600 solos) à devoir gérer leur effort. Anonymes comme stars de la discipline, résolus au dépassement.
© Extra Sports – S. Clavel, Lyon BD, Lilian Menetrier, Victor Barcus