[DOSSIER 1/3] Handicap : un monde en mouvement
Les troubles du neurodéveloppement comptent pour beaucoup dans les dossiers de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Invisibles par nature, ils font l’objet d’une détection précoce et d’aménagements de scolarité.
Publié le 4 novembre 2024
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Ni fauteuil, ni canne blanche. Rien d’évident, a priori, dans les troubles du neurodéveloppement (TND) qui relèvent pourtant du handicap. De quoi parle-t-on ? D’autisme, de graves dyslexies, dysgraphies, dyspraxies, de déficit intellectuel, de TDAH (déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité)… Leur prévalence va croissant depuis quelques années. Une personne sur 6 en France est concernée.
Les chercheurs soupçonnent des facteurs environnementaux. Sans doute cette progression résulte-t-elle, aussi, d'une nouvelle stratégie de dépistage impulsée par le gouvernement.
Détection précoce
De très gros moyens ont été investis depuis 2018 sur la détection précoce. L’idée : prévenir le sur-handicap.
Un retard de langage ou de motricité ? D’importantes difficultés à gérer ses émotions ? Les médecins sont invités à saisir la POC. Cette plateforme d’orientation et de coordination se propose d’organiser diagnostic et premiers soins.
Les familles bénéficient par son intermédiaire de moyens financiers : elles peuvent faire pratiquer bilans neuropsy et séances de psychomotricité (autrement non remboursés), même si le dispositif pèche, in fine, par le manque de praticiens spécialisés.
« Il faut souvent compter avec de longs mois d’attente, constate Laurine Perrin, neuropédiatre chargée de la plateforme à Saint-Étienne. Mais les enfants ne restent pas sans solution. »
50 nouveaux dossiers chaque mois
Initialement dimensionnée pour 2,5 équivalent-temps-plein, la POC Loire/Haute-Loire compte aujourd’hui plus de 10 salariés. Le minimum pour gérer 2 400 dossiers en file active (seuls les 0-6 ans étaient jusqu’ici pris en charge mais le dispositif sera étendu au 7-12 ans en 2025).
« 90 nouveaux dossiers nous arrivent tous les mois. La plupart nous sont adressés par la PMI (Protection maternelle et infantile). » Il faut dire que les infirmières scolaires du Département sont particulièrement vigilantes lors des bilans obligatoires réalisés en maternelle.
« Le suivi de la POC dure un an, renouvelable sur dérogation », précise Laurine Perrin. Parfois, cela suffit à régler un dysfonctionnement. Mais lorsque le TND est avéré ? Les familles se tournent alors vers la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) pour constituer un dossier et solliciter un accompagnement dans la durée.
En chiffres
72 000Le nombre de personnes reconnues en situation de handicap dans la Loire. Le taux départemental (8,9%) est supérieur à la moyenne nationale (8,5%). + 8,5%L'évolution du nombre de dossiers déposés entre 2022 et 2023.127,5 M€Le budget annuel consacré par le Département à la politique handicap. L'enveloppe englobe la prestation de compensation du handicap et les établissements spécialisés dans l'accueil des adultes.
Parole d'élus
Yves Partrat
vice-président délégué aux Solidarités humaines et à la Santé
« La détection est un axe majeur de la PMI, service départemental de proximité. Repérées en bas âge, les difficultés s’accompagnent de rééducations précoces. On peut ainsi espérer changer la trajectoire neurodéveloppementale de l’enfant et limiter le sur-handicap. La réactivité est essentielle. »
Parole de professionnel
La difficulté scolaire seule ne fait pas le handicap.
Frédéric Fléchet
Enseignant spécialisé mis à disposition de la MDPH
Quel est votre rôle au sein de la MDPH ?
Il consiste à évaluer, pour chaque demande déposée, la nature et l’importance des troubles ainsi que les besoins de compensation. Je travaille pour les 0-20 ans. La difficulté scolaire est omniprésente dans mon quotidien mais la difficulté scolaire seule ne fait pas le handicap. Des aménagements pédagogiques de droit commun, comme l’organisation d’examens dédiés ou la dispense de langue vivante, peuvent suffire dans le cas de légères dyslexies ou dyspraxies. C’est lorsque les besoins sont plus marqués que la MDPH est saisie. Elle établit alors un projet personnalisé de scolarisation, un PPS.
Quelles sont les aides prévues par le PPS ?
Cela peut être une dotation en matériel ou une aide humaine. On compte, dans la Loire, près de 2 000 AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap). Mais les besoins ne font que croître. Les TND, les multi-Dys, les TSA forment l’écrasante majorité de nos demandeurs.
Et lorsque l’aide humaine ne suffit pas ?
Alors nous pouvons suggérer une orientation en Ulis ou en Segpa. Il existe plus de 50 Ulis-école dans la Loire et tout autant d’Ulis-collèges. Certaines sont spécialisées dans l’accueil d’enfants autistes, d’autres dans les troubles des fonctions motrices. Et lorsque le maintien en milieu ordinaire n’est pas possible, il y a les institutions médico-sociales.
Décidez-vous seul des mesures à prendre ?
Non ! L’examen des demandes fait l’objet d’une discussion avec un médecin et une assistance sociale. Car les droits à la scolarité peuvent s’accompagner d’une allocation. Nous faisons également appel au regard d’intervenants extérieurs. Et la décision finale appartient à la CDAPH (commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées).
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© Noak Carrau